Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/241

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avait conquis en une année de fatigues. Alceste le pria de nouveau, se plaignant que ses prières n’eussent pas plus d’effet. Enfin, saisi de colère, il le menaça, disant qu’il le lui ferait faire de force ou de bonne volonté.

« Sa colère alla s’augmentant à un tel point, que des menaces il en vint aux actes. Alceste tira son épée contre le roi, et, malgré les efforts de mille courtisans qui s’étaient précipités à son secours, il le tua. Le même jour, à la tête des Ciliciens et des Thraces, qui étaient à sa solde, et de ses autres mercenaires, il défit complètement les Arméniens.

« Poursuivant sa victoire, et faisant la guerre à ses frais, en moins d’un mois, et sans qu’il en coûtât la moindre dépense à mon père, il lui rendit tout son royaume. Puis, pour compenser les pertes qu’il avait subies, outre les nombreuses dépouilles qu’il lui abandonna, il lui soumit une partie de l’Arménie, de la Cappadoce et de l’Hyrcanie qui s’étend jusqu’à la mer, et frappa l’autre partie d’un lourd tribut.

« À son retour, au lieu du triomphe auquel il s’attendait, nous résolûmes de lui donner la mort. Mais nous dûmes remettre l’exécution de ce projet afin de ne pas nous attirer de mésaventure, car il s’appuyait sur de nombreux amis. Je feignis de l’aimer, et je lui donnai de jour en jour une plus grande espérance de devenir sa femme. Mais auparavant, je lui dis que je désirais qu’il déployât sa vaillance contre nos autres ennemis.

« Et tantôt seul, tantôt avec peu de gens, je