Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/245

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mure, et les lacs tranquilles surpassent le cristal par leur limpidité. Une douce brise, toujours égale, se joue à leur surface, et agite l’air de façon à amortir la chaleur du jour.

Cette brise s’en va prélevant sur les fleurs, les fruits, le feuillage, des parfums de toute nature, dont elle forme un mélange suave qui nourrit l’âme. Au milieu de la plaine, surgit un palais qui semble brûler d’une flamme vive, tellement il projette, tout autour de lui, de splendeur et dé lumière inconnue aux mortels.

Astolphe dirige lentement son destrier vers le palais dont l’enceinte mesure plus de trente milles ; il admire de tout côté ce beau pays, et trouve le monde que nous habitons mauvais et misérable, en butte à la colère du ciel et de la nature, auprès de celui-ci qui est si suave, si resplendissant, si riant.

En approchant du palais lumineux, il reste frappé d’étonnement ; les murailles sont tout entières d’une seule pierre précieuse, plus vermeille et plus resplendissante que l’escarboucle. Ouvrage surprenant d’un ingénieux architecte ! quel est celui de nos chefs-d’œuvre qui pourrait lui être comparé ? Qu’il se taise, celui qui voudrait mettre en parallèle les sept merveilles du monde.

Sur le seuil éclatant de cette heureuse demeure, un vieillard s’avance vers le duc. Il est revêtu d’un manteau rouge et d’une robe blanche, dont l’une peut être comparée au lait, l’autre à la pourpre. Ses cheveux sont blancs ; ses joues sont couvertes