Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/289

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Elles en viennent bientôt à engager tellement leurs épées, grâce à la grande fureur qui les enflamme, qu’elles ne peuvent plus avancer, et qu’elles sont obligées de se prendre corps à corps. Elles laissent tomber leurs épées, dont elles ne peuvent plus se servir, et cherchent à se faire de nouvelles blessures. Roger les prie, les supplie toutes deux ; mais ses paroles obtiennent peu de succès.

Enfin, quand il voit que ses prières n’ont aucun résultat, il se décide à les séparer de force. Il leur arrache le glaive des mains, et le jette au pied d’un cyprès. Ne leur voyant plus d’armes avec lesquelles elles puissent se blesser, il s’interpose de nouveau entre elles par ses prières et ses menaces. Mais tout est vain ; elles continuent la bataille à coups de poings et à coups de pieds, à défaut d’autres armes.

Roger ne cesse de les supplier. Il les saisit tour à tour par les mains, par les bras, et cherche à les séparer. À la fin Marphise tourne sa colère contre lui. Marphise, qui tient tout le reste du monde en mépris, ne se souvient plus de l’amitié que Roger lui porte ; elle quitte Bradamante, court prendre son épée, et s’attaque à Roger.

« Tu agis comme un discourtois et comme un vilain, Roger, en venant troubler le combat des autres ; mais cette main t’en fera repentir ; elle peut suffire à vous vaincre tous les deux. » Roger cherche, par de douces paroles, à apaiser Marphise ; mais elle est tellement animée