Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/32

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de la bagarre, qu’elle voit les deux autres recommencer leur querelle avec une colère nouvelle.

Marphise, voulant les mettre d’accord, disait : « Seigneurs, écoutez mon conseil. Il convient de remettre toute querelle jusqu’à ce qu’Agramant soit hors de péril. Si personne ne veut céder, je vais mé reprendre moi aussi avec Mandricard, et je verrai enfin si, comme il l’a dit, il est assez fort pour me conquérir par les armes.

« Mais si nous devons aller au secours d’Agramant, allons-y sans retard, et qu’entre nous cesse toute contestation. » « Pour moi, je n’irai pas plus avant — dit Roger — à moins que mon destrier ne me soit rendu. Sans plus de paroles, qu’il me donne mon cheval, ou qu’il le défende contre moi. Je resterai mort ici, ou je retournerai au camp sur mon destrier. »

Rodomont lui répond : « Obtenir ce dernier résultat ne te sera pas aussi facile que d’obtenir le premier » Et il poursuit en disant : « Je te préviens que s’il arrive malheur à notre roi, ce sera par ta faute, car pour moi, je suis prêt à faire pour lui ce que je dois. » Roger ne s’arrête pas à cette observation ; saisi de fureur, il tire son épée.

Comme un sanglier, il se précipite sur le roi d’Alger, le heurte de l’écu et de l’épaule, l’ébranle et le met dans un tel désordre, qu’il lui fait perdre un étrier. Mandricard lui crie : « Roger, diffère cette bataille, ou combats avec moi. » Et ce disant, plus cruel, plus félon qu’il ne s’était