Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/73

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me causer en ce moment, que de me dire une histoire, de me donner un exemple qui vienne confirmer ma propre opinion ? Pour que je puisse mieux t’écouter, et pour que tu racontes plus à ton aise, assieds-toi vis-à-vis de moi, que je te voie en face. » Mais je vous dirai dans le chant qui suit ce que l’hôte fit entendre à Rodomont.


CHANT XXVIII


Argument. — L’hôtelier conte à Rodomont l’histoire de Joconde. Rodomont, ayant changé son premier dessein d’aller en Afrique, s’arrête dans une petite chapelle abandonnée où arrive Isabelle avec l’ermite, conduisant les restes mortels de Zerbin. Le païen veut détourner Isabelle de la résolution qu’elle a prise de se retirer du monde, et s’impatiente des remontrances de l’ermite.



Dames — et vous qui avez les dames en estime — pour Dieu ! ne prêtez pas l’oreille à cette histoire que l’hôte s’apprête à raconter pour déverser sur vous le mépris, l’infamie et le blâme. Une langue si vile ne saurait pas plus vous salir que vous glorifier. C’est du reste une vieille habitude de la part du vulgaire ignorant, de gloser sur chacun, et de parler le plus de ce qu’il comprend le moins.

Laissez ce chant ; mon histoire peut aller sans lui et n’en sera pas moins claire. Turpin l’ayant mis, j’ai cru devoir le mettre aussi, non par mal-