Aller au contenu

Page:L’Héritier de Villandon - L’Avare puni, 1734.djvu/13

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
8
L’AVARE PUNI.

Les Soupirans vont déserter ;
Le seul Imbert tendre & fidelle
Jusque dans son adversité,
Sollicite toujours leur hymen projetté.
Si sa constance ici vous paroît heroïque,
Les nobles sentimens dont Nantide se pique,
Ne montrerent pas moins de générosité.
Puisque nous sentons même flamme,
Dit-elle, si vos biens étoient pareils au rang
Que vous donne l’éclat du sang,
Je serois bien-tôt votre femme,
Et même mon bonheur me paroîtroit plus doux
Si je le tenois tout de vous :
Mais à nos feux le sort cessant d’être propice,
Par la perte des biens nous fait sentir ses coups.
N’allons point, aveuglez par un tendre caprice
Malgré le Ciel unir notre sort par des nœuds
Qui pourroient devenir funestes à tous deux :
Sans l’heureux secours des richesses,
Souvent les plus fortes tendresses
Se changent en mépris affreux :
Ainsi tournez ailleurs vos vœux,
Et cherchez le secret de plaire
À quelque opulente Heritiere ;
Je souffrirai bien moins si je vous vois heureux,
Imbert de ce discours s’offense,
Et jure à sa Maitresse éternelle constance
Malgré leur destin rigoureux.
Leur entretien, jadis si plein de charmes,
Se termina par bien des larmes.
Dans la maison d’Ernoux, où regnoient les plaisirs,