Page:L’Odyssée (traduction Bareste).djvu/135

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truisit une enceinte pour la ville,éleva des palais pour les hommes, des temples pour les dieux, et fit le partage des terres.

Mais ce héros, vaincu par le destin, est déjà descendu dans les sombres demeures de Pluton. Alcinoüs, instruit dans la sagesse par les dieux immortels, règne sur ces peuples. — C'est dans son palais que s'arrête Minerve, la déesse aux yeux d'azur, méditant en son âme le retour du courageux Ulysse. D'abord elle pénètre dans la superbe chambre où repose une jeune vierge que sa taille élégante et ses formes divines égalent aux immortelles, Nausica, la fille du magnanime Alcinoüs ; deux suivantes, qui reçurent des Grâces la beauté en partage, dorment à l'entrée de cette chambre dont les magnifiques portes sont étroitement fermées. Comme un souffle léger, Minerve s'approche du lit de la jeune vierge, se penche vers sa tête et lui parle en se montrant semblable à la fille du célèbre nautonier Dymante, compagne du même âge qu'elle et la plus chère à son cœur. Minerve aux yeux d'azur, sous les traits de la fille du nautonier, lui dit :

« Nausica, ta mère, en te donnant le jour, te rendit bien négligente ; car tes beaux vêtements sont jetés çà et là sans aucun ordre. Cependant le jour de ton mariage approche, ce jour où tu dois revêtir de riches parures, et en offrir à ceux qui te conduiront vers ton époux[1]. Les vêtements somptueux font acquérir parmi les hommes une renommée qui rend joyeux un père et une mère vénérables. Nausica, dès que brillera la déesse Aurore, allons ensemble plonger ces vêtements dans les ondes du fleuve ; moi, je t'accompagnerai pour t'aider, afin que tout soit prêt promptement ; car tu ne seras pas longtemps vierge. Déjà les plus illus-

  1. Dugas-Montbel, en voulant s'écarter des versions françaises et latines, a commis un non-sens en traduisant : τὰ δὲ τοῖσι παρασχεῖν, οἵ κέ σ᾽ ἄγωνται (vers 28) par : « et même en offrir à celui qui sera votre époux. » Cet auteur, dans ses Observations, a voulu justifier sa traduction en s'appuyant sur ce qu'il appelle la syntaxe de la pensée ; nous pensons qu'il aurait mieux fait de s'appuyer sur la syntaxe de la grammaire ; car le passage d'Homère signifie textuellement : et en offrir des vêtements à ceux qui te conduisent. D'ailleurs, madame Dacier et Bitaubé, sans être très clairs, se sont un peu plus rapprochés du sens ; et Clarke, Oublier et Voss ont traduit très exactement le vers que nous venons de citer.