Page:La Bhagavadgita, trad. de Senart, 1922.djvu/96

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6. La première est la matrice de tous les êtres, je suis, moi[1], l’origine et la fin de l’univers tout entier.

7. Il n’est rien au-dessus de moi, ô héros ; je suis la trame sur laquelle le tout est tissé, tels les rangs de perles sur un fil.

8. Dans l’eau je suis le goût, ô fils de Kuntî, la lumière dans la lune et dans le soleil, la syllabe oṃ dans tous les vedas, le son dans l’espace, la virilité dans les hommes.

9. Je suis dans la terre le parfum, la splendeur dans l’astre du jour, la vie dans tous les êtres, l’ascèse dans les ascètes.

10. Sache, ô fils de Pṛithâ, que je suis le germé éternel de tous les êtres ; je suis la pensée des êtres pensants, la grandeur des grands.

11. Je suis la force, affranchie de désir et de passion, des forts ; dans les êtres vivants je suis, ô héros des Bhâratas, l’amour permis.

12. Tous les dérivés du sattva, comme du rajas ou du tamas[2], sache bien qu’ils procèdent de

  1. « Moi » c’est-à-dire « mon essence transcendante ».
  2. Le sativa, le rajas et le tamas qu’on transcrit en « bonté », « passion », « ténèbres », sont les trois gunas dont il a été souvent question. « Guna » signifie dans la langue courante qualité : mais c’est, je pense, sur un sens très différent que s’est échafaudée cette théorie singulière. En somme elle se résume à imaginer que la prakṛiti se compose de ces trois éléments qui, mélangés en proportions diverses, constituent, aux diffé-