Page:La Boétie - Œuvres complètes Bonnefon 1892.djvu/338

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252 ESTIENNE DE LA BoÉ'r1E Quel grand honneur en peut eltre tiré? Le traducteur ne donne à fon ouurage Rien qui foit iien que le fimple langage : Que mainte nuiét deffus le liure il fonge, Etdepité les ongles il Den ronge : 20 Qu’vn vers rebelle il ait cent fois changé, Et en traiïant le papier outrage; Qu’il perde apres mainte bonne iournee, C’e(t mefme corps, mais la robbe eit tournee 2 Touüours l’autheur vers foy la gloire ameine, 25 Et le tourneur n’er1 retient que la peine. D’vn œuure beau la louange en eit deuë A qui l’a fait, non pas qui le remue. D’vn grand palais, celuy qui le deuife, C’eit des ouuriers celuy la que l’on prife. 30 Où peult affeoir d’auoir fa recompenfe Le traducteur malheureux fa liance? A fes efcripts le fçauant ne prend garde, Fors qu’en paffant, au moins Oil les regarde, Soigneux d’auoir la cognoiffance entiere, 35 Et voir la chofe en fa forme premiere : L’ignorant feul fes efcripts pourra veoir: Mais quel honneur en pourroit il auoir? Iamais en rien d’vn ignorant Peftime Ne fut honneur ny gloire legitime. 4Q Il ne fçauroit faire honneur à perfonue : Car qui n’en a, à nul autre n’en donne. Bien a celuy le courage abbattu, Qui n’attend rien de fa propre vertu; Bien a vrayment celuy peu de fageiïe, 45 Du bien d’autruy qui fe fait fa richeiïe.