Page:La Brière - Champollion inconnu.djvu/145

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 141 —

Qu’à ce trait généreux je connais en ce jour
Dans un parfait amant, le plus parfait amour !
Mais, c’est assez, Seigneur, pour une infortunée
Suivre sa passion contre sa destinée…
Il en coûterait trop pour vouloir m’épargner :
Il faut me planter là, mon cousin, pour régner.

Bajazet

Vous planter là, Madame, ah c’est me faire injure !…

Atalide

Eh ! seigneur, croyez-vous ma tendresse assez dure
Pour ne me vouloir pas aussi sacrifier.
Un amour sans tourment, ce serait trop grossier…
Ce n’est pas que le sort d’une triste fortune
Quand vous le partagez ait rien qui m’importune
Ah ! cousin, croyez-moi, si nous étions encor
À ces temps trop heureux de l’ancien âge d’or
Où le lait en ruisseau coulait dans les prairies,
Où les grives tombaient au bec toutes rôties,
Où les champs présentaient des biscuits pour moissons
Où les ondes, tout frits nous donnaient les poissons,
Que j’eusse aimé vous voir près de moi sous un hêtre
Quitter la royauté, pour un repas champêtre,
Soupirant nuit et jour, filer l’amour parfait,
Et vous accompagnant du tendre flageolet
Vous même roucouler quelque douce romance ;
Ou danser avec moi l’aimable contredanse ;
Je te dirais alors : que sert d’être empereur ?
Ah ! n’avons nous pas tout, quand nous avons un cœur ?…
Si j’avais seulement la lampe merveilleuse,