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Page:La Brochure mensuelle - Année 1923 - Numéros 1 à 12B.djvu/224

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Or, vous dites que l’Univers effet a pour cause Dieu. Il convient donc de dire également que la Cause-Dieu a pour effet l’Univers.

Il est impossible de séparer l’effet de la cause ; mais il est également impossible de séparer la cause de l’effet.

Vous affirmez enfin que Dieu-Cause est éternel. J’en conclus que l’Univers-Effet est également éternel, puisqu’à une cause éternelle doit inéluctablement correspondre un effet éternel.

S’il en était autrement, c’est-à-dire si l’Univers avait commencé, durant les milliards et les milliards de siècles qui, peut-être, ont précédé la création de l’Univers, Dieu aurait été une cause sans effet, ce qui est impossible, une cause de rien, ce qui serait absurde.

En conséquence, Dieu étant éternel, l’Univers l’est aussi, et si l’Univers est éternel, c’est qu’il n’a jamais commencé, c’est qu’il n’a pas été créé.

Est-ce clair ?

deuxième série d’arguments


premier argument :

Le Gouverneur nie le Créateur

Il en est — et ils sont légion — qui, malgré tout, s’obstinent à croire. Je conçois que, à la rigueur, on puisse croire à l’existence d’un créateur parfait ; je conçois que, à la rigueur, on puisse croire à l’existence d’un gouverneur nécessaire ; mais il me semble impossible qu’on puisse raisonnablement croire à l’un et à l’autre, en même temps : ces deux Êtres parfaits s’excluent catégoriquement ; affirmer l’un, c’est nier l’autre ; proclamer la perfection du premier, c’est confesser l’inutilité du second ; proclamer la nécessité du second, c’est nier la perfection du premier.

En d’autres termes, on peut croire à la perfection de l’un ou à la nécessité de l’autre ; mais il est déraisonnable de croire à la perfection des deux : il faut choisir.

Si l’Univers créé par Dieu eût été une œuvre parfaite, si, dans son ensemble et dans ses moindres détails, cette œuvre eût été sans défaut, si le mécanisme de cette gigantesque création eût été irréprochable, si tel et si parfait eût été son agencement qu’il n’eût point été à redouter qu’il se produisît un seul détraquement, une seule avarie, bref, si l’œuvre eût été digne de cet ouvrier génial, de cet artiste incomparable, de ce constructeur fantastique qu’on appelle Dieu, le besoin d’un gouverneur ne se serait nullement fait sentir.