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Page:La Bruyère - Œuvres complètes, édition 1872, tome 1.djvu/391

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73 (I)


« Lucain a dit une jolie chose… Il y a un beau mot de Claudien… Il y a cet endroit de Sénèque » : et là-dessus une longue suite de latin, que l’on cite souvent devant des gens qui ne l’entendent pas, et qui feignent de l’entendre. Le secret serait d’avoir un grand sens et bien de l’esprit ; car ou l’on se passerait des anciens, ou après les avoir lus avec soin, l’on saurait encore choisir les meilleurs, et les citer à propos.


74 (V)


Hermagoras ne sait pas qui est roi de Hongrie ; il s’étonne de n’entendre faire aucune mention du roi de Bohême ; ne lui parlez pas des guerres de Flandre et de Hollande, dispensez-le du moins de vous répondre : il confond les temps, il ignore quand elles ont commencé, quand elles ont fini ; combats, sièges, tout lui est nouveau ; mais il est instruit de la guerre des géants, il en raconte le progrès et les moindres détails, rien ne lui est échappé ; il débrouille de même l’horrible chaos des deux empires, le Babylonien et l’Assyrien ; il connaît à fond les Egyptiens et leurs dynasties. Il n’a jamais vu Versailles, il ne le verra point : il a presque vu la tour de Babel, il en compte les degrés, il sait combien d’architectes ont présidé à cet ouvrage, il sait le nom des architectes. Dirai-je qu’il croit Henri IV fils de Henri III ? Il néglige