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Page:La Bruyère - Œuvres complètes, édition 1872, tome 2.djvu/245

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48 (IV)

Il n’y a aucun métier qui n’ait son apprentissage, et en montant des moindres conditions jusques aux plus grandes, on remarque dans toutes un temps de pratique et d’exercice qui prépare aux emplois, où les fautes sont sans conséquence, et mènent au contraire à la perfection. La guerre même, qui ne semble naître et durer que par la confusion et le désordre, a ses préceptes ; on ne se massacre pas par pelotons et par troupes en rase campagne sans l’avoir appris, et l’on s’y tue méthodiquement. Il y a l’école de la guerre : où est l’école du magistrat ? Il y a un usage, des lois, des coutumes : où est le temps, et le temps assez long que l’on emploie à les digérer et à s’en instruire ? L’essai et l’apprentissage d’un jeune adolescent qui passe de la férule à la pourpre, et dont la consignation a fait un juge, est de décider souverainement des vies et des fortunes des hommes.