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Page:La Bruyère - Le Premier Texte de La Bruyère, éd. Jouaust, 1868.djvu/216

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Les Caracteres

monte à la teste, leur fait perdre la raison et les fait vomir, nous dirions : Cela est bien barbare.

Il est ordinaire et comme naturel de juger du’travail d’autruy seulement par rapport à celuy qui nous occupe. Ainsi le Poëte, rempli de grandes et sublimes idées, estime peu le discours de rOrateur, qui ne s’exerce souvent que sur de simples faits ; et celuy qui écrit l’histoire de son païs ne peut comprendre qu’un esprit raisonnable employé sa vie à imaginer des fictions et à trouver une rime ; de mesme le Bachelier, plongé dans les quatre premiers siècles, traite toute autre doctrine de science triste, vaine et inutile, pendant qull est peut-estre méprisé du Géomètre.

Ce Prélat se montre peu à la Cour, il n’est de nul commerce, on ne le voit point avec des femmes, il ne joue ny à grande ny à’petite prime, il n’assiste ny aux festes ny aux spectacles, il n’est point homme de caballe, et il n’a point l’esprit d’intrigue ; toujours dans [son Evesché, où il fait une résidence continuelle, il ne songe qu’à instruire son peuple par la parole et à l’édifier par son exemple ; il consume son bien en des aumônes, et son corps par la pénitence ; il n’a que l’esprit de régularité, et il est imitateur du zèle et de la pieté des Apostres. Les temps sont changez, et il est menacé sous ce règne d’un titre plus éminent.