Page:La Bruyère - Les Caractères, Flammarion, 1880.djvu/169

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de noces qui ne coûtent rien, et qui doivent être rendus en espèce !

I8 (IV)

L’utile et la louable pratique, de perdre en frais de noces le tiers de la dot qu’une femme apporte ! de commencer par s’appauvrir de concert par l’amas et l’entassement de choses superflues, et de prendre déjà sur son fonds de quoi payer Gaultier, les meubles et la toilette !

I9 (IV)

Le bel et le judicieux usage que celui qui, préférant une sorte d’effronterie aux bienséances et à la pudeur, expose une femme d’une seule nuit sur un lit comme sur un théâtre, pour y faire pendant quelques jours un ridicule personnage, et la livre en cet état à la curiosité des gens de l’un et de l’autre sexe, qui, connus ou inconnus, accourent de toute une ville à ce spectacle pendant qu’il dure ! Que manque-t-il à une telle coutume, pour être entièrement bizarre et incompréhensible, que d’être lue dans quelque relation de la Mingrélie ?

20 (I)

Pénible coutume, asservissement incommode ! se chercher incessamment les unes les autres avec l’impatience de ne se point rencontrer ; ne se rencontrer que pour se dire des riens, que pour s’apprendre réciproquement des choses dont on est également instruite, et dont il importe peu que l’on soit instruite ; n’entrer dans une chambre précisément que pour en sortir ; ne sortir de chez soi l’après-dînée que pour y rentrer le soir, fort satisfaite d’avoir vu en cinq petites heures trois suisses, une femme que l’on connaît à peine, et une autre que l’on n’aime guère ! Qui considérerait bien le prix du temps, et combien sa perte est irréparable, pleurerait amèrement sur de si grandes misères.

2I (VII)

On s’élève à la ville dans une indifférence grossière des choses rurales et champêtres ; on distingue à peine la plante qui porte le chanvre d’avec celle qui produit le lin, et le blé froment d’avec les seigles, et l’un ou l’autre d’avec le méteil : on se contente de se nourrir et de s’habiller. Ne parlez à un grand nombre de bourgeois ni de guérets, ni