Page:La Bruyere - Caracteres ed 1696.djvu/114

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Un ancien galant tient à ſi peu de choſe, qu’il cède à un nouveau mari, & celuy-ci dure ſi peu, qu’un nouveau galant qui ſurvient luy rend le change. Un ancien galant craint ou mépriſe un nouveau rival, ſelon le caractère de la perſonne qu’il ſert. Il ne manque ſouvent à un ancien galant, auprès d’une femme qui l’attache, que le nom de mari : c’eſt beaucoup, & il ſeroit mille fois perdu ſans cette circonſtance.

20. — Il ſemble que la galanterie dans une femme ajoute à la coquetterie. Un homme coquet au contraire eſt quelque choſe de pire qu’un homme galant. L’homme coquet & la femme galante vont aſſez de pair.

21. — Il y a peu de galanteries ſecrètes. Bien des femmes ne ſont pas mieux déſignées par le nom de leurs maris que par celuy de leurs amants.

22. — Une femme galante veut qu’on l’aime ; il ſuffit à une coquette d’eſtre trouvée aimable & de paſſer pour belle. Celle-là cherche à engager ; celle-ci ſe contente de plaire. La première paſſe ſucceſſivement d’un engagement à un autre ; la ſeconde a pluſieurs amuſements tout à la fois. Ce qui domine dans l’une, c’eſt la paſſion & le plaiſir, & dans l’autre, c’eſt la vanité & la légèreté. La galanterie eſt un faible du cœur ou peut-eſtre un vice de la complexion, la coquetterie eſt un dérèglement de l’eſprit. La femme galante ſe foit craindre & la coquette ſe foit haïr. L’on peut tirer de ces deux caractères de quoy en faire un troiſième, le pire de tous.

23. — Une femme faible eſt celle à qui l’on reproche une faute, qui ſe la reproche à elle-meſme ; dont le cœur combat la raiſon ; qui veut guérir, qui ne guérira point, ou bien tard.

24. — Une femme inconſtante eſt celle qui n’aime plus ; une légère, celle qui déjà en aime un autre ; une volage, celle qui ne ſçait ſi elle aime & ce qu’elle aime ; une indifférente, celle qui n’aime rien.

25. —