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Page:La Bulgarie au lendemain d'une crise, 1895.djvu/25

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homme d’État exposait en réalité la Bulgarie au péril de voir surgir un parti tout à la dévotion de l’influence russe sur le terrain des aspirations nationales. Un arc trop tendu se casse. Un gouvernement qui, sous le couvert d’une haine implacable contre la Russie, avait introduit le régime du bon plaisir, écrasait sans pitié toute velléité d’indépendance, se mettait au-dessus des lois, supprimait la liberté personnelle, ruinait la fortune publique et aliénait à la monarchie la faveur populaire, un tel gouvernement devait forcément inspirer tout d’abord l’aversion et le dégoût, et faire naître ensuite la tendance, périlleuse pour l’État, de s’affranchir de lui à tout prix, quitte à retomber sous la tutelle russe. C’est cette tendance à pactiser avec le mal pour en éviter un pire qui a été enrayée parla crise du 18 mai 1894, véritable œuvre d’affranchissement à l’intérieur.

Dès lors, quel sens attacher encore à cette épithète « russophile » dont on a fait un usage immodéré depuis le 18 mai ? Si l’on considère comme russophile le Bulgare qui, malgré son inébranlable attachement à la dynastie nationale, malgré son énergie à maintenir l’indépendance territoriale et politique, trouve au moins inutile de mécontenter et de provoquer la Russie sans que rien justifie une