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DICTIONNAIRE HISTORIQUE



DE



L’ANCIEN LANGAGE FRANÇOIS


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H


H HAB


H. Cette lettre, dont l’origine est phénicienne, faisoit partie de l’alphabet que les Grecs reçurent de Cadmus. Ils l’employèrent d’abord comme pure aspirée ; changée depuis en E long, elle remplaça l’Eta ou les deux E E qu’on remarque sur d’anciennes inscriptions grecques ; mais les Latins et les Etrusques, qui se l’approprièrent dans la suite, lui conservèrent toujours sa qualité de pure aspirée, ce qui l’a fait rejeter par quelques grammairiens comme inutile. C’est peut être par allusion à cette prétendue inutilité qu’on a dit : « Telles gens… au reste comptez pour h qu’est moins qu’un zero. » (S. Jul. Mesl. hist. p. 551.) — Si l’on en croit Eust. Deschamps, « N’est pas h proprement lettre, mais n’est que une aspiration sonant selon la maniere des noms. » (Poës. MSS. fol. 396, col. 1.) — Nous appelons « lettres » les divers sons dont on se sert pour parler. Si l’h est un « son » comme cet auteur en convient lui-même, c’est donc aussi une lettre propre à exprimer, en françois, un son âpre comme chez les Romains. Exemple : « Hauteur, honte. » Lorsqu’elle n’est point aspirée comme dans « honneur, homme, » c’est un caractère et non pas un son. Anciennement ce caractère précédoit quelquefois les noms propres de personnes ou de lieux commençant par les lettres B, C, L, N, R, T. (Voyez Le Blanc, pages 16, 127.) — L’Italie surtout, depuis qu’elle fut assujettie aux Lombards et aux François, fournit divers exemples d’h ajoutées devant les c comme Hcarolus, Hcalende. Nous observerons que ces mots, commençant d’ailleurs souvent par le k, ont pu faire juger à quelques auteurs que le hc en étoit la décomposition. L’usage que les François en particulier ont fait de l’h, devant certains mots pour en fortifier la prononciation, étoit conforme au goût teutonique. Quelquefois même cette lettre étoit précédée d’un c, ce qui devoit en rendre le son encore plus rude. On retrouve un exemple de l’aspiration produite par la réunion de ces deux lettres dans l’emploi que font de l’h au lieu du c les paysans de quelques cantons du diocèse de S. Malo. Ils disent hlef, hloche, hloitre pour clef, cloche, cloitre. (Gloss. de l’Hist. de Bretagne.) — La prononciation devoit naturellement s’adoucir en se perfectionnant. De là le retranchement de l’h au commencement d’un grand nombre de mots où cette lettre étoit inutile. On l’exclut même de ceux où l’on auroit dû la conserver en faveur de l’étymologie, et l’usage en devint presque incertain, comme il est aisé de voir en jetant un coup d’œil sur les articles des lettres H et A. — [H est le cheth de la stèle moabite ; cette lettre phénicienne a pour origine un hiéroglyphe égyptien représentant une haie. Cette aspirée est devenue voyelle en grec, bien qu’elle conserve son caractère d’aspirée dans les plus anciennes inscriptions grecques. (Voir Diction. des Antiquités de Daremberg et Saglio, art. alphabet.) — Dans la langue d’oïl, ainsi que l’a montré M. Schuchardt, cette lettre n’est qu’une notation orthographique ; ainsi le mot latin olea donne huile et œillette ; homo mène à on, et hominem à homme : « Après vous conterai de l’ache Qui par dessous d’un pié se lace ; Li uns dit ache, l’autre ha ; Sans mouvoir langue dit-on : ha. » (Senefiance de l’A, B, C, dans Jubinal, II, 278, XIIIe s.)]

Ha. [Exclamation : « Ha, sire, firent-ils, nous ne nous oseriens asseoir si près de vous. » (Joinville, § 37.)]

Habandonnéement. [Hardiment : « Et pour ce firent nagier habandonnéement : dont il avint ainsi, que nostre neis hurta à une queue de sablon qui estoit en la mer. » (Joinv. § 618.)]

Habereau. [ « Le suppliant a prins et emblé un habereau avecques une paire de chausses de bureau. » (JJ. 195, p. 1317, an. 1474.)]

1o Habitation : « La tierce chose qui me muet, A visiter ton habergaige. » (Consol.


VII. 1