Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 1.djvu/356

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ce portrait qu'elle avait trouvé si agréable. Cette ressemblance la surprit et le lui fit regarder avec plus d'attention. Elle alla chercher le long du rivage pour voir si elle ne trouverait point une cassette où était ce portrait, et qu'elle croyait avoir vu mettre dans la chaloupe lorsqu'elles avaient fait naufrage. Sa peine fut inutile ; elle sentit un chagrin extraordinaire de ne pouvoir trouver ce qu'elle cherchait. Il lui parut, pendant quelques jours, que Théodoric avait de la passion pour elle ; quoiqu'elle n'en pût juger par ses paroles, il y avait un air dans ses actions qui le lui faisait soupçonner, et ses soupçons ne lui étaient pas désagréables.

Quelque temps après, elle crut s'être trompée ; elle le vit triste, sans qu'elle lui donnât sujet de l'être ; elle vit qu'il la quittait souvent pour aller rêver ; enfin elle s'imagina qu'il avait quelque autre passion qui le rendait malheureux. Cette pensée lui donna un trouble et un chagrin qui la surprirent et qui la rendirent aussi mélancolique que Théodoric le lui paraissait. Quoique Félime fût assez occupée de ses propres pensées, elle connaissait trop bien l'amour pour ne se pas apercevoir de celui que Théodoric avait pour Zayde et de l'inclination que Zayde avait pour Théodoric. Elle lui en parla plusieurs fois, et, quelque répugnance qu'eût cette belle princesse à se l'avouer à elle-même, elle ne put s'empêcher de l'avouer à Félime.

— Il est vrai, lui dit elle, j'ai des sentiments pour Théodoric dont je ne suis pas la maîtresse ; mais, Félime, n'est-ce point de lui dont Albumazar m'a voulu parler ? Et ce portrait que nous avons vu ne serait-il point fait pour lui ?

— Il n'y pas d'apparence, répondit