Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 1.djvu/44

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pare Zayde et les illustres françaises[1], on sera étonné que ces deux ouvrages aient pu passer un instant pour être de la même main ; et, sans savoir moins de gré à Ségrais de la bonne foi avec laquelle il désabusa le public, on conviendra qu’il y eut peu de mérite au public à revenir facilement de son erreur.

Le docte Huet, depuis évêque d’Avranches, fut lié d’une amitié très-tendre avec madame de la Fayette, et il lui en donna de précieuses marques. Le prêtre ne crut point porter atteinte à la sévérité canonique, en faisant l’apologie des romans, dont son illustre amie avait assujetti la morale et l’action aux lois de la plus rigoureuse délicatesse : le savant puisa dans les trésors de l’érudition pour faire l’histoire de ce genre d’écrits jusqu’à l’époque où elle était venue y opérer une si heureuse révolution. Son Traité de l’origine des romans fut imprimé en tête de Zayde. C’est à ce sujet que madame de la Fayette disait à Huet : Nous avons marié nos enfants ensemble. Lorsqu’il s’agit de rendre cette même Zayde à son véritable auteur, Huet déposa, dans un de ses écrits, un témoignage auquel la qualité du témoin et la connaissance particulière qu’il avait du fait, donnèrent le plus grand poids, et qui a servi en grande partie à fixer sur ce point l’opinion des contemporains et celle de la postérité[2].

  1. Nouvelles de Ségrais
  2. « Ses Nouvelles (de Ségrais) furent bien reçues du public, moins toutefois que Zayde et quelques autres ouvrages de ce genre, qui parurent sous son nom, et qui étaient en effet de la comtesse de la Fayette, comme lui et la comtesse l’ont déclaré souvent à plusieurs de leurs amis, qui en peuvent rendre un assuré témoignage. Pour Zayde, je le sais d’original ; car j’ai souvent vu madame de la Fayette occupée à ce travail, et elle me le communiqua tout entier pièce à pièce, avant que de le rendre public…… Je rapporte ce détail pour désabuser quelques personnes, qui, bien que peu instruites de la vérité de ce fait, ont voulu le contester. » Huet, Origines de Caen.