Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 2.djvu/127

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la lui avouer. Je n’ai rien à lui avouer, reprit-il ; la lettre ne s’adresse pas à moi, et, s’il y a quelqu’un que je souhaite d’en persuader, ce n’est pas madame la dauphine ; mais, madame, comme il s’agit en ceci de la fortune de M. le vidame, trouvez bon que je vous apprenne des choses qui sont même dignes de votre curiosité. Madame de Clèves témoigna par son silence qu’elle était prête à l’écouter, et M. de Nemours lui conta le plus succinctement qu’il lui fut possible tout ce qu’il venait d’apprendre du vidame. Quoique ce fussent des choses propres à donner de l’étonnement, et à être écoutées avec attention, madame de Clèves les entendit avec une froideur si grande, qu’il semblait qu’elle ne les crût pas véritables, ou qu’elles lui fussent indifférentes. Son esprit demeura dans cette situation jusqu’à ce que M. de Nemours lui parla du billet de madame d’Amboise, qui s’adressait au vidame de Chartres, et qui était la preuve de tout ce qu’il lui venait de dire. Comme madame de Clèves savait que cette femme était amie de madame de Thémines, elle trouva une apparence de vérité à ce que lui disait M. de Nemours, qui lui fit penser que la lettre ne s’adressait peut-être pas à lui. Cette pensée la tira tout d’un coup, et malgré elle, de la froideur qu’elle avait eue jusqu’alors. Ce prince, après lui avoir lu ce billet qui faisait sa justification, le lui présenta pour le lire, et lui dit qu’elle en pouvait connaître l’écriture : elle ne put s’empêcher de le prendre, de regarder le dessus pour voir s’il s’adressait au vidame de Chartres, et de le lire tout entier pour juger si la lettre que l’on redemandait était la même qu’elle avait entre les mains.