Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 2.djvu/170

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui se préparait ; et, remplie de ses propres pensées, elle avait toute la liberté de s’y abandonner. Tout le monde était chez le roi. M. de Clèves venait à de certaines heures lui en dire des nouvelles. Il conservait avec elle le même procédé qu’il avait toujours eu, hors que, quand ils étaient seuls, il y avait quelque chose d’un peu plus froid et de moins libre. Il ne lui avait point reparlé de tout ce qui s’était passé ; et elle n’avait pas eu la force, et n’avait pas même jugé à propos de reprendre cette conversation.

M. de Nemours, qui s’était attendu à trouver quelques moments à parler à madame de Clèves, fut bien surpris et bien affligé de n’avoir pas seulement le plaisir de la voir. Le mal du roi se trouva si considérable que le septième jour il fut désespéré des médecins. Il reçut la certitude de sa mort avec une fermeté extraordinaire, et d’autant plus admirable qu’il perdait la vie par un accident si malheureux, qu’il mourait à la fleur de son âge, heureux, adoré de ses peuples, et aimé d’une maîtresse qu’il aimait éperdûment. La veille de sa mort, il fit faire le mariage de Madame, sa sœur, avec M. de Savoie, sans cérémonie. L’on peut juger en quel état était la duchesse de Valentinois. La reine ne permit point qu’elle vît le roi, et lui envoya demander les cachets de ce prince, et les pierreries de la couronne qu’elle avait en garde. Cette duchesse s’enquit si le roi était mort ; et, comme on lui eut répondu que non : Je n’ai donc point encore de maître, répondit-elle, et personne ne peut m’obliger à rendre ce que sa confiance m’a mis entre les mains. Sitôt qu’il fut expiré, au château des Tournelles, le duc de