Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 2.djvu/248

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La confiance s’augmenta de part et d’autre, et à tel point du côté de la princesse de Montpensier, qu’elle lui apprit l’inclination qu’elle avait eue pour M. de Guise ; mais elle lui apprit aussi en même-temps qu’elle était presque éteinte, et qu’il ne lui en restait que ce qui était nécessaire pour défendre l’entrée de son cœur à une autre inclination, et que, la vertu se joignant à ce reste d’impression, elle n’était capable que d’avoir du mépris pour ceux qui oseraient avoir de l’amour pour elle. Le comte, qui connaissait la sincérité de cette belle princesse, et qui lui voyait d’ailleurs des dispositions si opposées à la faiblesse de la galanterie, ne douta point de la vérité de ses paroles, et néanmoins il ne put se défendre de tant de charmes qu’il voyait tous les jours de si près. Il devint passionnément amoureux de cette princesse ; et, quelque honte qu’il trouvât à se laisser surmonter, il fallut céder, et l’aimer de la plus violente et de la plus sincère passion qui fut jamais. S’il ne fut pas maître de son cœur, il le fut de ses actions. Le changement de son ame n’en apporta point dans sa conduite, et personne ne soupçonna son amour. Il prit un soin exact pendant une année entière de le cacher à la princesse, et il crut qu’il aurait toujours le même desir de le lui cacher. L’amour fit en lui ce qu’il fait en tous les autres ; il lui donna l’envie de parler, et, après tous les combats qui ont accoutumé de se faire en pareilles occasions, il osa lui dire qu’il l’aimait, s’étant bien préparé à essuyer les orages dont la fierté de cette princesse le menaçait ; mais il trouva en elle une tranquillité et une froideur pires mille fois que toutes les rigueurs à quoi il s’était