Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 2.djvu/68

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arriva dans la salle, et me dit tout bas que le roi était dans une affliction et dans une colère qui faisaient pitié ; qu’en un raccommodement qui s’était fait entre lui et madame de Valentinois, il y avait quelques jours, sur des démêlés qu’ils avaient eus pour le maréchal de Brissac, le roi lui avait donné une bague, et l’avait priée de la porter ; que, pendant qu’elle s’habillait pour venir à la comédie, il avait remarqué qu’elle n’avait point cette bague, et lui en avait demandé la raison ; qu’elle avait paru étonnée de ne la pas avoir ; qu’elle l’avait demandée à ses femmes, lesquelles, par malheur, ou faute d’être bien instruites, avaient répondu qu’il y avait quatre ou cinq jours qu’elles ne l’avaient vue.

Ce temps est précisément celui du départ du maréchal de Brissac, continua M. d’Anville : le roi n’a point douté qu’elle ne lui ait donné la bague, en lui disant adieu. Cette pensée a réveillé si vivement toute cette jalousie, qui n’était pas encore bien éteinte, qu’il s’est emporté, contre son ordinaire, et lui a fait mille reproches. Il vient de rentrer chez lui très-affligé ; mais je ne sais s’il l’est davantage de l’opinion que madame de Valentinois a sacrifié sa bague, que de la crainte de lui avoir déplu par sa colère.

Sitôt que M. d’Anville eut achevé de me conter cette nouvelle, je me rapprochai de Sancerre pour la lui apprendre ; je la lui dis comme un secret que l’on venait de me confier, et dont je lui défendais de parler.

Le lendemain matin, j’allai d’assez bonne heure chez ma belle-sœur : je trouvai madame de Tournon au chevet de son lit ; elle n’aimait pas madame de Valentinois,