Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/191

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à ce qu’il me parut, un effort sur sa douleur : J’obéirai, madame, lui dit-elle. Madame de Mailly, contente de cette promesse, sortit. Mademoiselle de Roye l’accompagna et me fit dire par ma confidente, qu’elle ne rentrerait point dans sa chambre, tant que j’y serais.

Je me soumis sans résistance, et j’allai chez moi lui écrire, non pas une lettre, mais un volume. Le danger où je venais de l’exposer me rendait plus amoureux, et me la rendait mille fois plus chère. Cette voix pleine de charmes était encore à mon oreille, qui me disait d’un ton où la frayeur régnait toute seule : Mon Dieu, que vous ai-je fait ! Je ne puis vous représenter à quel point j’étais attendri, et combien ma passion y gagnait.

Je n’eus aucune réponse, et j’écrivis encore plusieurs fois sans pouvoir en obtenir. Je m’avisai enfin de lui mander que, si elle n’avait la bonté de m’entendre, elle m’exposerait à tenter quelque nouvelle entreprise pareille à la première. Peut-être s’exagéra-t-elle à elle-même le péril où je pouvais l’exposer ; d’ailleurs, la bienséance n’était point blessée, puisque je ne demandais à la voir qu’à la grille ; enfin elle y consentit.

Je n’ai jamais passé de temps plus agréable et cependant plus difficile à passer, que celui qui précéda le jour pris pour cette entrevue. Le plaisir de voir mademoiselle de Roye, de la voir de son consentement, l’espérance de la déterminer en ma faveur, les projets que je faisais pour l’avenir, remplissaient mon cœur d’une joie qui se répandait sur toutes mes actions ; mais mon impatience était si extrême, elle me donnait tant d’inquiétude, qu’il ne m’était pas possible de me fixer un moment. Je ne pouvais durer nulle