Page:La Femme grenadier.djvu/253

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plus violent m’embrâsait, je désirais ardemment, et redoutais presqu’autant d’inspirer le même sentiment. La franchise et l’innocence de Dorothée me mettaient quelquefois dans le cas de me flater d’être payé de retour : mon départ fut résolu, et je n’eus plus aucun doute sur sa tendresse. Jamais je n’ai tant souffert ; mais aussi, jamais je n’ai été si content de moi ; j’eus le courage de partir, sans faire à Dorothée l’aveu de mon amour. J’en fis confidence à notre ami Durand, ayant besoin de soulager mon cœur, et ne voulant pas me priver du plaisir de parler d’elle.

Maintenant que je suis libre, si Dorothée m’a conservé sa tendresse ; et si, comme la belle Sémire, maîtresse de Zadig, elle n’a point d’aversion pour les borgnes, je lui offrirai de partager mon sort. Je ne