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LIVRE TROISIÉME.

Attrape les plus paresseuses.
Nous en sçavons plus d’un, dit-il en les gobant :
C’est tour de vieille guerre ; et vos cavernes creuses
Ne vous sauveront pas ; je vous en avertis ;
Vous viendrez toutes au logis.
Il prophetizoit vray : nostre maistre Mitis
Pour la seconde fois les trompe et les affine ;
Blanchit sa robe, et s’enfarine ;
Et de la sorte déguisé
Se niche et se blotit dans une huche ouverte.
Ce fut à luy bien avisé :
La gent trote menu s’en vient chercher sa perte.
Un Rat sans plus s’abstient d’aller flairer au tour.
C’estoit un vieux routier ; il sçavoit plus d’un tour ;
Mesme il avoit perdu sa queuë à la bataille.
Ce bloc enfariné ne me dit rien qui vaille.
S’écria-t-il de loin au General des Chats.
Je soupçonne dessous encor quelque machine.
Rien ne te sert d’estre farine ;
Car quand tu serois sac je n’approcherois pas.
C’estoit bien dit à luy ; j’approuve sa prudence.
Il estoit expérimenté ;
Et sçavoit que la méfiance
Est mere de la seureté[1].



  1. Dans les éditions de 1668 et de 1669, ce livre troisième a ici deux fables de plus ; L’œil du Maistre, et L’alouëtte et ses petits avec le Maistre d’un Champ ; dans l’édition de 1678, ces deux fables ont été transportées à la fin du livre quatrième.