Qui n’en estoient pas revenus,
Et que depuis cent ans sous l’abysme avoient veus
Les anciens du vaste empire.
n Rat hoste d’un champ, Rat de peu de cervelle,
Des Lares paternels un jour se trouva sou.
Il laisse-là le champ, le grain, et la javelle,
Va courir le païs, abandonne son trou.
Si-tost qu’il fut hors de la case,
Que le monde, dit-il, est grand et spacieux !
Voilà les Apennins, et voicy le Caucase :
La moindre Taupinée estoit mont à ses yeux.
Au bout de quelques jours le voyageur arrive
En un certain canton où Thetis sur la rive
Avoit laissé mainte Huitre ; et nostre Rat d’abord
Crût voir en les voyant des vaisseaux de haut bord.
Certes, dit-il, mon pere estoit un pauvre sire :
Il n’osoit voyager, craintif au dernier point :
Pour moy, j’ai déjà veu le maritime empire :
J’ay passé les deserts, mais nous n’y bûmes point[1].
D’un certain magister le Rat tenoit ces choses,
Et les disoit à travers champs ;
N’estant point de ces Rats qui les livres rongeans
Se font sçavans jusques aux dents.
- ↑ C’est un souvenir du dialogue de Picrochole avec ses capitaines : « Que boyrons nous par ces desers ?… Nous (dirent ilz) auons ia donné ordre à tout… Voyre mais, dist il, nous ne beumes poinct frais. » (Rabelais, Gargantua, xxxiii.)