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LIVRE DOUZIÉME.

L’Hôte et l’Hôtesse, et tout leur monde ?
D’un grain de bled je me nourris ;
Une noix me rend toute ronde.
A present je suis maigre ; attendez quelque-tems,
Reservez ce repas à messieurs vos Enfans.
Ainsi parloit au Chat la Souris attrapée.
L’autre lui dit, Tu t’es trompée,
Est-ce à moi que l’on tient de semblables discours ?
Tu gagnerois autant de parler à des sourds.
Chat et vieux pardonner ? cela n’arrive gueres.
Selon ces loix descends là-bas,
Meurs, et va-t’en tout de ce pas
Haranguer les sœurs Filandieres.
Mes Enfans trouveront assez d’autres repas.
Il tint parole ; et pour ma Fable
Voici le sens moral qui peut y convenir.
La jeunesse se flate, et croit tout obtenir :
La vieillesse est impitoïable.




FABLE VI.
LE CERF MALADE.



En païs plein de Cerfs un Cerf tomba malade,
Incontinent maint Camarade
Accourt à son grabat le voir, le secourir.
Le consoler du moins ; Multitude importune
Eh ! messieurs, laissez-moi mourir ;
Permettez qu’en forme commune
La parque m’expedie, et finissez vos pleurs.
Point du tout : Les Consolateurs
De ce triste devoir tout au long s’acquitterent :
Quand il plut à Dieu s’en allerent.
Ce ne fut pas sans boire un coup,