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CONTES ET NOUVELLES.

Nostre poirier. Guillot monte à l’instant.
Grimpé qu’il est, le Drosle fait semblant.
Qu’il luy paroist que le mary se jouë
Avec la femme ; aussi-tost le Valet,
Frotant ses yeux comme estonné du fait :
Vrayment, Monsieur, commence-t-il à dire,
Si vous vouliez Madame caresser,
Un peu plus loin vous pouviez aller rire,
Et moy present du moins vous en passer.
Cecy me cause une surprise extrême.
Devant les gens prendre ainsi vos ébats !
Si d’un Valet vous ne faites nul cas,
Vous vous devez du respect à vous-mesme.
Quel taon vous point ? attendez à tantost :
Ces privautez en seront plus friandes ;
Tout aussi bien, pour le temps qu’il vous faut,
Les nuits d’esté sont encore assez grandes.
Pourquoy ce lieu ? vous avez pour cela
Tant de bons lits, tant de chambres si belles !
La Dame dit : Que conte celuy-là ?
Je crois qu’il resve : où prend-il ces nouvelles ?
Qu’entend ce fol avecque ses ébats ?
Descends, descends, mon ami, tu verras.
Guillot descend. Hé bien ! luy dit son maistre
Nous joüons-nous ?
Guillot.
Non pas pour le present.
Le Mary.
Pour le present ?

Guillot.

       Oüy, Monsieur, je veux estre
Ecorché vif, si tout incontinent
Vous ne baisiez Madame sur l’herbette.
La Femme.
Mieux te vaudroit laisser cette sornette ;
Je te le dis ; car elle sent les coups..