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CONTES ET NOUVELLES.
Que vous estes belle aujourd’huy !
Luy dit-il : Qu’avez-vous, Madame,
Qui vous donne cet air d’un vray jour de Printemps[1]
Caliste, qui sçavoit les propos des Amans,
- ↑ Le fragment publié dans les éditions de 1669 se termine ainsi :
Le feint Eraste en mesme temps
Luy presente un miroir de poche ;
Caliste s’y regarde, et le Galant s’approche.
Il contemple, il admire, il leve au Ciel les yeux,
Il fait tant qu’il attrape un soûris gracieux.
Mauvais commencement, ce dit-il en soy-même,
Hé bien ! poursuivit-il, quand d’un amour extrême
On vous ayme,
A-t-on raison ? je m’en rapporte à vous.
Peut-on resister à ces charmes ?
Caliste.
On sçait bien, car comment ne pas devenir fous
Quand vos cœurs ont affaire à de si fortes armes ?
Sans mentir, Messieurs les Amans,
Vous me semblez divertissans :
J’aurois regret qu’on vous fist taire.
Mais sçavez-vous que vostre encens
Peut à la longue nous déplaire ?
Le feint Eraste.
Et pouvons-nous autrement faire ?
Tenez, voyez encor ces traits.
Caliste.
Je les vois, je les considere,
Je sçay quels ils sont, mais aprés ?
Le feint Eraste.
Aprés ? L’aprés est bon. Faut-il toûjours vous dire
Qu’on brusle, qu’on languit, qu’on meurt sous vostre empire ?
Caliste.
Mon Dieu ! non, je le sçais, mais aprés ?
Le feint Eraste.
Il suffit.