Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 4.djvu/128

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En faire une amitié ; quelque chose entre-deux ;
Un peu plus que ce n’est quand un cœur est sans feux ;
Moins aussi que l’estat où le vostre se treuve.


Acante.

Tout de bon, voulez-vous que j’en fasse l’épreuve ?
Que demain j’aime moins, et moins le jour d’aprés,
Diminuant toûjours, encor que vos attraits
Augmentent en pouvoir ? Le voulez-vous, Madame ?


Climene.

Oüy, puisque je l’ay dit.


Acante.

Oüy, puisque je l’ay dit. L’avez-vous dit dans l’ame ?


Climene.

Il faut bien.


Acante.

Il faut bien. Songez-y ; voyez si vostre esprit
Pourra voir ce déchet sans un secret dépit.
Peu de femmes feroient des vœux pareils aux vostres.


Climene.

Acante, je suis femme aussi bien que les autres ;
Mais je connois l’Amour, c’est assez : j’ay raison
D’en combattre en mon cœur l’agreable poison.
Voulez-vous procurer tant de mal à Climene ?
Vous l’aimez, dites-vous, et vous cherchez sa peine.
N’allez point m’alleguer que c’est plaisir pour nous.
Loin, bien loin tels plaisirs ; le repos est plus doux :
Mon cœur s’en défendra ; je vous permets de croire
Que je remporteray malgré moy la victoire.


Apollon.

Voilà du patetique assez pour le present :
Sur le mesme sujet donnez-nous du plaisant.


Melpomene.

Qui ferons-nous parler ?