Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 4.djvu/139

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L’un meurt, l’autre soûpire, et l’autre en son transport
Languit et se consume ; est-il plus douce chose ?

Climene, usez-en bien : vous n’aurez pas toûjours
Ce qui vous rend si fiere et si fort redoutée :
Caron nous passera sans passer les Amours ;
Devant ce temps-là mesme ils vous auront quittée.

Vous vivrez plus long-temps encor que vos attraits ;
Je ne vous réponds pas alors d’estre fidelle ;
Mes desirs languiront aussi bien que vos traits ;
L’Amant se sent déchoir aussi bien que la Belle.

Quand voulez-vous aimer que dans vostre Printemps ?
Gardez-vous bien sur tout de remettre à l’Automne :
L’Hyver vient aussi-tost ; rien n’arreste le temps ;
Climene, hastez-vous, car il n’attend personne.

Sire, je m’en tiens-là ; bien ou mal il suffit :
La Morale d’Horace, et non pas son esprit,
Se peut voir en ces Vers.


Apollon.

Se peut voir en ces Vers. Érato, que veut dire
Que vous, qui d’ordinaire aimez si fort à rire,
Demeurez Taciturne, et laissez tout passer ?


Érato.

Je rêvois, puisqu’il faut, Sire, le confesser.


Apollon.

Sur quoy ?


Érato.

Sur quoy ? Sur le debat qui s’est émeu n’aguere.


Apollon.

Sçavoir si vous aimez ?


Érato.

Sçavoir si vous aimez ? Autrefois j’estois fiere.