Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 4.djvu/199

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Daphné s’enfuit aussitôt qu’elle a reconnu Apollon sous le visage de Tharsis.

APOLLON.

Tu me fuis, divine mortelle !

Où cours-tu ? N’aperçois-tu pas

Un précipice sous tes pas ?

Il est plein de serpents : détourne-toi, cruelle. [755]

Suis-je encor plus à craindre ? Et rien dans ce vallon

Ne peut-il t’arrêter quand tu fuis Apollon ?

Quoi ! Tant de haine en une belle !

Insolent, qui brûles pour elle,

Renonce à l’hymen de Daphné ; [760]

C’est Apollon qui te l’ordonne.

Regarde quel rival ton malheur t’a donné.

LEUCIPPE.

Mon malheur ? Dis le tien. Toi, le fils de Latone !

N’es-tu pas ce Tharsis que tantôt on a vu ?

D’un magique ornement ton front s’est revêtu. [765]

Enchanteur, penses-tu que ta pompe m’étonne ?

Ce n’est qu’un songe, ce n’est rien ;

Va tromper d’autres yeux, et me laisse mon bien.

APOLLON.

Ô dieux ! Ô citoyens du lumineux empire !

Que vient un mortel de me dire ? [770]

Malheureux, ton orgueil s’en va te coûter cher.

Les dieux ne sont pas insensibles.

Qu’on l’attache sur ce rocher

Avec des chaînes invisibles.

Ce commandement est exécuté par les ministres de la puissance d’Apollon, qui va se faire voir à Pénée, non plus sous le personnage de Tharsis, mais sous le sien propre.

ACTE V