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Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 4.djvu/331

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p}} Ah ! Ma mère, voilà la perle des servantes...

À Marinette.


Embrasse-moi, ma fille...

À Agathe.

Auriez-vous cru cela ?

Eh bien ! Avec ces soins, ma mère, et ces clefs-là,

La garde d'une femme est-elle si terrible,

Et croyez-vous encore cette chose impossible ?

AGATHE

Mon fils, bouleverser l'ordre des éléments,

Sur les flots irrités voguer contre les vents,

Fixer selon ses vœux la volage fortune,

Arrêter le soleil, aller prendre la lune ;

Tout cela se ferait beaucoup plus aisément,

Que soustraire une femme aux yeux de son amant,

Dussiez-vous la garder avec un soin extrême,

Quand elle ne veut pas se garder elle-même.

HARPAGÊME

Il n'est pas question d'aller contre les vents

Ni d bouleverser l'ordre des éléments,

Mais de garder Hortense ; et j'ai pour y suffire,

De bons murs, des verrous, et deux yeux : c'est tout dire.

AGATHE

Abus. Lorsque l'amour s'empare de deux cœurs,

Pour rompre leur commerce et vaincre leurs ardeurs,

Employez les secrets de l'art, de la nature,

Faites faire un tout d'une épaisse structure,

Rendez ces fondements voisins des sombres lieux,

Élevez son sommet jusqu'aux voûtes des cieux,

Enfermez l'un des deux dans le plus haut étage,

Qu'à l'autre le plus bas devienne le partage,

Dans l'espace entre eux deux, par différents d"tours,

Disposez plus d'Argus qu'un siècle n'a de jours,

Empruntez des ressorts les plus cachés obstacles ;