Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 4.djvu/416

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Je vois qu'en secret tu me blâmes

D'avoir pu concevoir de si honteuses flammes ;

Mais, hélas ! Qui n'aurait vainement combattu

Contre les traits dont il a su m'atteindre ?

Il allait expirer ; l'onde venait d'éteindre

Le vif éclat de ses attraits :

La pitié lui prêta ses traits.

L'oracle, les destins, tout lui fut favorable.

Rien ne vint s'opposer à ma naissante ardeur.

LÉONIDE


Que de raisons ont fait entrer dans votre cœur

Un ennemi si redoutable !

GALATÉE


Mes yeux me trompent-ils ? C'est à toi d'en juger.

LÉONIDE


Princesse, il est charmant ; mais ce n'est qu'un berger.

GALATÉE


Par les nœuds de l'hymen le sceptre et la houlette

Se sont uni plus d'une fois.

L'amour n'est plus amour, dès qu'il cherche en ce choix

Une égalité si parfaite.

Mon cœur est excusable, et Galatée enfin

Serait-elle, sans toi, dans cette peine extrême ?

Léonide, ce fut toi-même

Qui me fis, malgré moi, consulter ce devin.

" Princesse, me dit-il, voici votre destin

Une étoile ennemie autant que favorable,

Peut vous rendre en hymen heureuse ou misérable.

Dans ce miroir regardez bien ces lieux :

Vers le déclin du jour il faudra vous y rendre ;

Celui qui s'offrira le premier à vos yeux

Est l'époux que le Ciel vous ordonne de prendre. "

J'aperçus ce berger : résisterai-je aux dieux ?

LÉONIDE