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Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 5.djvu/254

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XVII.

LE ROSSIGNOL ET LE MoINEAU

AMOUREUX DE LA FAUVETTE.

Le tendre Rossignol et le galant Moineau,
L’un et l'autre charmé d'une jeune Fauvette,
Sur les branches d’un ormeau,
Luy parloient un soir d’amourette.
Le petit chantre aislé par des airs doucereux,
S’eforçoit d'amolir le coeur de cette belle:
Je seray, disoit-il, toujours tendre et fidele,
Si vous voulez me rendre heureux.
De mes douces chansons vous sçavez l’harmonie,
Elles ont mérité les suffrages des Dieux;
Desormais je les sacrifie .
A chanter vos beautez, vostre nom en tous lieux:
Les ?chos de leurs voix le rediront sans cesse,
Et j’auray tant de soin de le rendre ?clatant,
O?e vostre coeur enfin sera content
De voir l’excez de ma tendresse.
Et moy, dit le Moineau, je vous baisera� tant !... ’
Aces mots le procez fut jug? dans. l’instant,
En faycur de l’Oyseau qui porte gorge noire;
On renvoya l’Oyseau chantant.

Voila la fin de mon histoire.
En voicy la morale et qu’il faut retenir:
Beautez, qui tous les jours voyez dans vos ruelies
Un tas d’Amans transis ne vous entretenir
Que de leurs vains soupirs, de leurs peines cruelles,
Bagatelles !
Songez à preferer le solide au brillant.
On se passe fort bien de vers, de chansonettes;
Le talent du Moineau, c’est là le vray talent.

Voyez pages 229 et 230.