Page:La Fontaine - Fables, Bernardin-Bechet, 1874.djvu/150

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Ce que l’on voulait qui fût dit.
Le seul tribut les tint en peine :
Car que donner ? il fallait de l’argent.
On en prit d’un prince obligeant,
Qui, possédant dans son domaine
Des mines d’or, fournit ce qu’on voulut.
Comme il fut question de porter ce tribut,
Le mulet et l’âne s’offrirent,
Assistés du cheval ainsi que du chameau.
Tous quatre en chemin ils se mirent
Avec le singe, ambassadeur nouveau.
La caravane enfin rencontre en un passage
Monseigneur le lion : cela ne leur plut point.
Nous nous rencontrons tout à point,
Dit-il ; et nous voici compagnons de voyage.
J’allais offrir mon fait à part ;
Mais, bien qu’il soit léger, tout fardeau m’embarrasse.
Obligez-moi de me faire la grâce
Que d’en porter chacun un quart :
Ce ne vous sera pas une charge trop grande,
Et j’en serai plus libre et bien plus en état
En cas que les voleurs attaquent notre bande,
Et que l’on en vienne au combat.
Éconduire un lion rarement se pratique.
Le voilà donc admis, soulagé, bien reçu,
Et, malgré le héros de Jupiter issu,
Faisant chère et vivant sur la bourse publique.
Ils arrivèrent dans un pré
Tout bordé de ruisseaux, de fleurs tout diapré,
Où maint mouton cherchait sa vie ;
Séjour du frais, véritable patrie
Des zéphyrs. Le lion n’y fut pas qu’à ces gens
Il se plaignit d’être malade.