Page:La Fontaine - Fables, Bernardin-Bechet, 1874.djvu/325

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Son nez meurtri le force à changer de langage.
Oh ! oh ! dit-il, je saigne ! Et que serait-ce donc
S’il fût tombé de l’arbre une masse plus lourde,
Et que ce gland eût été gourde ?
Dieu ne l’a pas voulu : sans doute il eut raison ;
J’en vois bien à présent la cause.
En louant Dieu de toute chose
Garo retourne à la maison.


V

L’ÉCOLIER, LE PÉDANT ET LE MAÎTRE D’UN JARDIN

Certain enfant qui sentait son collége,
Doublement sot et doublement fripon
Par le jeune âge et par le privilége
Qu’ont les pédants de gâter la raison,
Chez un voisin dérobait, ce dit-on,
Et fleurs et fruits. Ce voisin, en automne,
Des plus beaux dons que nous offre Pomone
Avait la fleur, les autres le rebut.
Chaque saison apportait son tribut ;
Car au printemps il jouissait encore
Des plus beaux dons que nous présente Flore.
Un jour dans son jardin il vit notre écolier,
Qui, grimpant sans égard sur un arbre fruitier,
Gâtait jusqu’aux boutons, douce et frêle espérance,
Avant-coureurs des biens que promet l’abondance :
Même il ébranchait l’arbre ; et fit tant à la fin
Que le possesseur du jardin
Envoya faire plainte au maître de la classe.
Celui-ci vint suivi d’un cortége d’enfants :
Voilà le verger plein de gens
Pires que le premier. Le pédant, de sa grâce,