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LIVRE II, FABLE VIII

Quand l’aigle sut l’inadvertance,
Elle menaça Jupiter
D’abandonner sa cour, d’aller vivre au désert,
De quitter toute dépendance,
Avec mainte autre extravagance.
Le pauvre Jupiter se tut.
Devant son tribunal l’escarbot comparut,
Fit sa plainte, et conta l’affaire.
On fit entendre à l’aigle enfin qu’elle avait tort ;
Mais les deux ennemis ne voulant point d’accord,
Le monarque des dieux s’avisa, pour bien faire,
De transporter le temps où l’aigle fait l’amour
En une autre saison, quand la race escarbote
Est en quartier d’hiver, et, comme la marmotte,
Se cache et ne voit point le jour.

VIII

LE LION ET LE MOUCHERON

Va-t’en, chétif insecte, excrément de la terre !
C’est en ces mots que le lion
Parlait un jour au moucheron.
L’autre lui déclara la guerre.
Penses-tu, lui dit-il, que ton titre de roi
Me fasse peur ni me soucie ?
Un bœuf est plus puissant que toi ;
Je le mène à ma fantaisie.
A peine il achevait ces mots,
Que lui-même il sonna la charge,
Fut le trompette et le héros.