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Page:La Fontaine - Fables choisies, Barbin 1692, tome 1.djvu/47

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LA VIE

grand credit prés de Lycerus Roy de Babilone. Les Rois d’alors s’envoyoient les uns aux autres des Problêmes à ſoudre ſur toutes ſortes de matieres, à condition de ſe payer une eſpece de tribut ou d’amende, ſelon qu’ils répondroient bien ou mal aux queſtions propoſées : en quoy Lycerus aſſiſté d’Eſope, avoit toûjours l’avantage, & ſe rendoit illuſtre parmi les autres, ſoit à reſoudre, ſoit à propoſer. Cependant noſtre Phrygien ſe maria ; & ne pouvant avoir d’enfans, il adopta un jeune homme d’extraction noble, appellé Ennus. Celuy-cy le paya d’ingratitude, & fut ſi méchant que d’oſer foüiller le lit de ſon bien-facteur. Cela eſtant venu à la connoiſſance d’Eſope, il le chaſſa. L’autre, afin de s’en venger, contrefit des lettres, par leſquelles il ſembloit qu’Eſope euſt intelligence avec les Rois qui eſtoient emules de Lycerus. Lycerus perſuadé par le cachet & par la ſignature de ces lettres, commanda à un de ſes Officiers nommé Hermippus, que ſans chercher de plus grandes preuves, il fiſt mourir promptement le traître Eſope. Cet Hermippus eſtant amy du Phrygien, luy ſauva la vie ; & à l’inſceu de tout le monde le nourrit long-temps dans un Sepulchre ;