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Le Bouif errant

qui se mit à hurler au contact d’un glaçon fourvoyé dans son faux-col.

— C’est rien, assura tranquillement Bicard, tandis que Ladislas calmait le gérant et payait la casse. Je vais remettre ça. Vous allez voir.

Mais le ministre plénipotentiaire le secouait avec fureur.

— Forcené idiot ! Dourak ! Paltoquet ! Dégoûtant voyou !

— N’en jetez plus ! prononça Bicard. Je ne me rappellerai jamais tous vos noms. Moi, c’est Alfred que je m’intitule.

La colère suffoquait tellement le diplomate qu’il n’entendit point la réponse. Congestionné, gonflé à éclater, il bégayait avec rage :

— Vous avez insulté la Carinthie ! Vos témoins ! Par Sainte Etelred la Concubine, je vous donnerai demain un grand coup de sabre, monsieur.

— Sans blague ? fit doucement le Bouif. Ne vous secouez donc pas comme ça. Vous avez perdu votre binocle et vous finirez par marcher dessus. C’est vot’ bide qu’est la cause de tout ça. Si vous n’aviez pas serré la nappe contre la table avec vot’ bide, j’aurais pas raté l’truc du machin. C’est vot’ bide qu’est responsable.

Contrarié par cet incident grotesque, Ladislas s’efforçait de calmer les soupeuses et les fêtards éclaboussés. Les femmes péroraient, s’agitaient, prenaient parti. Un moment, une bataille générale sembla prête à s’engager. Seul le Bouif paraissait avoir conservé tout son sang-froid.

— Votre carte ? hurla tout à coup Bossouzof. Vous me rendrez raison, monsieur !