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Page:La Grande Revue, Vol 51, 1908.djvu/762

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Ellen Key

Un des gros problèmes de notre époque est assurément celui des rapports entre l’individu et la société, de l’équilibre entre l’individualisme et l’altruisme. Au cours du dix-neuvième siècle les inventions mécaniques successives, le développement de l’industrie firent se former et se répandre des théories socialistes. Sous diverses variations et transformations courait le même thème dans la société future bien organisée, le bien de chaque individu sera subordonné à celui de la collectivité. Et maint prophète annonça le triomphe prochain de cette conception sociale. Mais en même temps apparurent d’autres prophètes, ennemis ardents des premiers. Contre Karl Marx, l’apôtre du socialisme se dressa Nietzsche, champion de l’individualisme. Jamais, disait-il, l’individu ne doit être subordonné à la collectivité, c’est-à-dire étouffé par elle. Tout au contraire, il a une existence, une valeur qui lui sont propres. Il doit avant toute chose développer sa personnalité. Il se créera lui-même ses lois et n’en reconnaîtra point d’autres. S’il n’est point assez robuste pour les imposer, il succombera. Qu’importe ? D’autres survivront, êtres supérieurs, « surhommes » dont se composera la société future. Et au début du vingtième siècle cette conception fait échec à la précédente, si même elle ne gagne pas du terrain.

Laquelle triomphera ? Laquelle doit l’emporter ? Voilà les questions que, sa vie durant, se posa la Suédoise Ellen Key. Elle n’a jamais cessé de méditer ce problème. Qu’elle nous entretienne des questions les plus diverses, de la femme ou de la religion, de l’école ou du féminisme, du mariage ou de l’industrie, la même