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Mémoires

neur d’une place dont j’ai oublié le nom. Il ne fut pas plutôt arrivé chez nous et m’eut saluée, qu’il me prit par la main pour faire un tour de jardin. Nous nous promenâmes dans une allée ; M. de Château-Roy et mon mari nous suivoient. Il m’entretint de plusieurs choses, entre autres que la reine, qui étoit régente en ce temps-là, vouloit qu’il retournât en Catalogne pour servir en qualité de vice-roi et de général d’armée, et que les Catalans mêmes en avoient supplié Sa Majesté, en sorte, qu’il n’avoit que quinze jours pour donner ordre à ses affaires, et qu’il n’étoit pas peu embarrassé. Après lui avoir témoigné ma joie sur le choix que la reine avoit fait de sa personne pour la Catalogne, je lui dis : « Monsieur, vous avez encore une affaire à quoi vous ne songez pas. Vous souvenez-vous que vous m’avez dit que vous vouliez être marié de ma main, et même que vous m’avez fait l’honneur de m’en écrire de votre prison ? J’y ai agi d’une telle sorte que vous ne pouvez pas vous en dédire ; vous êtes marié à une demoiselle aussi accomplie qu’on en voie. » Je lui en dis tout ce qui en étoit. Il fut tellement surpris de joie qu’il ne savoit que me répondre, sinon qu’il me fit cent remerciements les plus honnêtes et les plus obligeants du monde. Je lui dis : « Monsieur, allons manger notre soupe et partons. Vous n’avez pas de temps à perdre. Vous vous en irez faire votre

    on le retrouve encore dans l’armée de Catalogne, lieutenant-colonel du régiment de Montpouillan, et toujours aide de camp.