Page:La Guette - Mémoires, 1856.djvu/269

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
217
de Mme de La Guette.

plus civilement qu’il me fut possible, le considérant pour ce qu’il est, c’est-à-dire pour le plus généreux et le plus obligeant de tous les hommes, et qui fait les choses de meilleure grâce. Je lui serai obligée toute ma vie pour celle que j’ai reçue de lui.

Quand la campagne fut finie, M. de Benting me fit l’honneur de me venir voir aussi, et me témoigna qu’il avoit considéré mon enfant autant que s’il avoit été son propre frère ; qu’il avoit eu un extrême déplaisir de sa mort ; qu’il ne l’oublieroit jamais ; qu’il seroit toujours prêt de me rendre, et à ma famille, tous les bons offices qu’il pourroit, et que je fisse compte là-dessus. Je le remerciai un million de fois, et le suppliai très-humblement de nous continuer l’honneur de sa bienveillance auprès de Son Altesse. C’est un grand et généreux ami, puisqu’il porte l’amitié plus loin que le tombeau ; et nous en avons eu des marques que je publierai partout, et dirai qu’il y a fort peu de gentilshommes au monde qui soient plus bienfaisants que lui et qui soient plus dignes de l’affection d’un grand prince. Je souhaite de tout mon cœur que sa faveur dure un siècle.

Quoi que j’eusse fait une forte résolution de me consoler et de prendre le tout de la main de Dieu, je succombai néanmoins sous le fardeau, et tombai dans une maladie des plus violentes qu’on puisse ressentir : c’étoit une fièvre chaude qui dura vingt-deux jours et qui me fit perdre le jugement et la