MÉMOIRES
de madame
DE LA GUETTE
e n’est pas une chose fort extraordinaire
de voir les histoires des hommes
qui, par leurs beaux faits ou par leurs
vertus éminentes, se sont rendus recommandables
à la postérité, ou qui
ont été élevés ou abaissés selon les caprices de la
fortune ; mais il se trouve peu de femmes qui s’avisent
de mettre au jour ce qui leur est arrivé dans
leur vie. Je serai de ce petit nombre ; et pour commencer
l’histoire de ma vie, je dirai que je suis fille
d’un homme qui avoit l’estime et l’approbation de
toute la noblesse de son pays, et même de quelques
princes qui luy faisoient l’honneur de le considérer.
C’estoit un des beaux esprits de son temps et
beaucoup recherché pour son bon conseil, parce
qu’il étoit universel. Son père étoit un cadet de