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Page:La Guette - Mémoires, 1856.djvu/92

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Mémoires

l’armée de Lorraine en ce temps-là[1]. Il en eut du regret, car il croyoit la chose véritable. Il prit même la peine de le faire savoir à ma sœur, afin qu’elle prît son temps pour me le dire ; mais par discrétion elle voulut attendre que je fusse accouchée ; et par la grâce de Dieu, je sus le contraire avant mon accouchement. Mon mari me donna de ses nouvelles ; il est bien vrai qu’il fut malade à la mort, à Rotterdam ; car l’armée avoit été obligée de passer en Hollande après le siège de Louvain[2] ; et il se trouva là, comme tous les autres, assez chagrin, pour avoir le vent contraire et la bourse plate. Néanmoins il en fallut passer par là et attendre un vent favorable pour se mettre en mer et aborder en France, ce qu’ils firent avec peine. J’accouchai heureusement en ce temps-là, et en louai Dieu de tout mon cœur. Mon mari arriva incontinent après et me témoigna beaucoup de joie d’avoir un fils. Quand il se fut un peu reposé, il voulut aller voir son enfant, qui étoit en nourrice à une lieue de là. Il y avoit chez nous un de ses amis nommé Courceule, capitaine dans le régiment de Créquy[3], qui voulut être de la partie. Nous mon-

  1. 1635. Le roi avoit conduit lui-même une armée en Lorraine pour s’opposer au duc Charles IV, qui avoit tenté de marcher sur Nancy ; mais bientôt sa présence n’étant plus nécessaire, il étoit revenu en France, laissant ses troupes sous les commandements du cardinal de Lavalette, du duc de Saxe-Weimar, du duc de La Force et du duc d’Angoulême.
  2. Le siège de Louvain fut levé en 1635, par la jalousie du prince d’Orange qui n’aimoit pas Richelieu.
  3. Peut-être le baron de Courcelles. Il avoit servi comme vo-