Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 7.djvu/133

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pourtant rien au monde de si faux ; mon regret augmentait à chaque instant, surtout lorsque je voyais la rigueur dont les moindres fautes étaient punies.

» C’est le roi lui-même qui fait exécuter la justice : il a toujours auprès de lui quatre cents bourreaux qui composent sa garde ordinaire. Personne ne peut se soustraire à la sévérité de ses châtimens. Les fils et les frères des rois n’en sont pas plus exempts que les autres. Les châtimens les plus communs sont de fendre la bouche jusqu’aux oreilles à ceux qui ne parlent pas assez, et de la coudre à ceux qui parlent trop. Pour des fautes assez légères, on coupe les cuisses à un homme ; on lui brûle les bras avec un fer rouge ; on lui donne des coups de sabre sur la tête, ou on lui arrache les dents. Il faut n’avoir presque rien fait pour n’être condamné qu’à la bastonnade, à porter la cangue au cou, ou à être exposé tête nue à l’ardeur du soleil. Pour ce qui est de se voir enfoncer sous les ongles des bouts de cannes qu’on pousse jusqu’à la racine, mettre les pieds au cep, et plusieurs autres supplices de cette espèce, il n’y a presque personne à qui cela ne soit arrivé au moins quelquefois dans la vie. Surpris de voir les plus grands mandarins exposés à la rigueur de ces traitemens, je demandai à Constance si j’avais à les craindre pour moi. Il me répondit que non, et que cette sévérité n’avait pas lieu pour les étrangers ; mais il mentait ; car il avait eu lui-même