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Indes, où pourtant il ne devait pas arriver. On n’exigea point qu’il fit rien débarquer avant la vente. Les négocians turcs ou arabes se contentèrent des essais qu’il avait apportés de son bord, et, concluant le marché sur terre, ils envoyaient prendre les marchandises dans leurs propres barques, à mesure qu’elles étaient achetées et payées. Enfin il dut être très-satisfait d’eux ; mais, lorsqu’il leur parla du gouverneur d’Aden, tous blâmèrent la témérité qu’il avait eue d’entrer dans une ville de guerre, et l’assurèrent qu’il devait se trouver très-heureux d’en être sorti.

Il revint à Socotora, et, prenant la route de Cambaye, il vint relâcher à Moa. Les habitans lui offrirent, pour une somme très-modique, un pilote expérimenté qui le conduirait dans ces parages, reconnus pour très-dangereux jusqu’à la barre de Surate. Il le refusa, et dut s’en repentir. Le vaisseau toucha terre en sortant du canal de Moa ; il fit eau de tous côtés. Il fallut abandonner les marchandises, et une grande partie de l’argent, et se jeter sur une chaloupe, que, pour comble de malheur, un coup de vent brisa dans la baie de Gandevi : tout l’équipage gagna la terre, et fut traité avec humanité par les naturels du pays ; mais, n’espérant point de voir arriver de vaisseaux dans cette baie, ils reprirent la route d’Europe par terre, traversèrent avec des peines incroyables une longue étendue de contrées alors peu connues et arrivèrent enfin dans leur patrie.