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couvrent d’une poudre douce dont le goût approche de celui de la réglisse. Trente-six livres de cette plante ne rendent qu’un quart de poudre. Le suc qui produit cette poudre est si actif et si vénéneux, qu’il occasione des enflures et des pustules sur la peau, partout où il tombe. Aussi les femmes mettent-elles des gants pour manier et préparer cette plante ; et ceux qui la mangent verte au printemps la mordent sans y toucher avec les lèvres. Voici comment on en tire de l’eau-de-vie.

On la fait fermenter par paquets, avec de l’eau chaude, dans un petit vase où l’on mêle des baies de gimolost. On tient ce vase couvert dans un endroit chaud. Cette première fermentation produit une liqueur qu’on appelle prigolovok. Pour en faire de la braga, boisson plus forte, on la verse dans un vase d’eau, et on y mêle encore du matteït. Ce mélange fermente vingt-quatre heures, et quand il cesse de bouillir, on a de la braga. C’est avec celle-ci que se fait l’eau-de-vie. On la jette dans une chaudière, avec les herbes destinées à la distillation. Cette chaudière est bouchée d’un couvercle de bois, dans lequel on fait passer un canon de fusil qui sert de tuyau. La première distillation donne une eau-de-vie commune, qui s’appelle raka. Les gens riches boivent de la seconde distillation, qui rend cette eau-de-vie d’une force à ronger le fer. Elle n’en conviendrait que mieux aux entrailles dures de cette classe d’hommes qu’une nature grossière